La Commission des Affaires étrangères, de la Défense et des forces armées du Sénat s’intéresse de près au résultat du référendum qui se tiendra au Royaume-Uni, le 23 juin prochain, sur le maintien ou non de ce pays dans l’Union européenne.
Le Royaume-Uni a fait le choix volontaire de rejoindre l’UE en 1973 et bénéficie depuis d’un certain nombre d’exemptions. Elles sont d’ailleurs en phase avec son approche de ce que représente principalement, à ses yeux, ce regroupement de pays. Il ne faut pas oublier que le Royaume-Uni fait aussi partie du Commomwealth. En compagnie de Jean-Pierre Raffarin et de Christian Cambon, nous sommes allés à la rencontre de nombreux parlementaires britanniques pour une journée d’échanges après avoir rencontré des hommes et femmes d’affaires français et francophones autour de notre Ambassadeur, Madame Sylvie Bermann.
Leur analyse de la situation se résume en un mot : incertitude. Tous s’accordent sur les conséquences de ce scrutin quel qu’en soit le résultat sur le plan intérieur et au sein de l’Union. Elles entraineront forcément des changements profonds et pas seulement au niveau politique. La participation est un élément clef, voire déterminant. La campagne doit convaincre les indécis encore très nombreux. Nous avons débuté avec Lord Lawson, en présence d’un membre de la campagne "Vote Leave" par une présentation détaillée des arguments du camp conservateur qui soutient ardemment le Brexit. Il mène campagne sur les thèmes économique et sécuritaire, notamment la problématique des migrants et de restauration de la souveraineté nationale. Nous avons ensuite rencontré deux conseillers du Premier ministre au 10 Downing street pour faire le point sur la campagne du Bremain.
Paradoxalement, les thèmes sont similaires avec une vision et analyse totalement opposées. Nous avons enchainé avec Crispin Blunt, Président de la Commission des affaires étrangères de la Chambre des Communes avant de nous entretenir avec Lord Jay of Ewelme et ses collègues de la commission des affaires européennes de la Chambre des Lords. Le long échange avec Vernon Bogdanor, spécialiste des Institutions politiques britanniques et James Landale, rédacteur en chef adjoint de la BBC a confirmé la complexité d’un débat où les avis sont à la fois partagés et irréconciliables. Le Premier ministre, David Cameron, est un des dirigeants anglais les plus eurosceptiques qui, piégé à son propre jeu politique, défend maintenant avec force le maintien de son pays dans une Union européenne qu’il a jusqu’alors critiquée.
La campagne permet aussi à Boris Jonhson, tête de file du Brexit chez les Conservateurs, de mener une bataille interne pour la succession au leadership du parti. La campagne est aussi compliquée pour le Labour, parti européen depuis les années 80, qui est peu motivé à soutenir le Premier ministre et encore moins attaché à défendre un marché unique approfondi. L’UE se résume malheureusement pour beaucoup de Britanniques à un lieu d’échanges et non un projet politique.
Avant notre départ pour la gare de Saint Pancras, nous avons rencontré le Ministre des Affaires Européennes qui rentrait de Belfast où les principaux partis semblent engagés pour le Bremain. Son dynamisme et son engagement sont louables mais, comme tous nos interlocuteurs, il ne pouvait nous éclairer sur l’issue de ce scrutin à risque. Seule constance dans tous ces échanges, le pragmatisme des Anglais qui guidera leur choix et une campagne qui se jouera jusqu’à la dernière minute. Pour ma part, après avoir mal vécu 2005 en France et activement participé à deux referendums sur l’Europe en Irlande, je sais combien il est important de parler d’Europe, de ses atouts et de ce qu’elle apporte aux citoyens. Important de prendre le temps pour faire de la pédagogie au lieu de décrier sans cesse cette Union qui nous permet à tous de vivre en paix.
Retrouvez ici le lien de l’émission de Public Sénat consacrée à ce déplacement, le reportage est à 26’58 :