Le Parlement a voté les mesures d’urgence liées à la crise sanitaire du Coronavirus. Deux projets de loi viennent détailler les dispositions exceptionnelles mises en œuvre par le gouvernement : le projet de loi d’urgence et le projet de loi de finances rectificatives.
1 – Le projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 a été adopté le 22 mars 2020 suite à l’adoption du texte par la Commission mixte paritaire (cliquez ici pour lire le texte).
Sur le modèle de l’état d’urgence prévu par la loi de 1955 et activé suite aux attentats de 2015, le gouvernement prévoit un nouveau régime d’état d’urgence sanitaire pour une durée de deux mois. Sa prorogation au-delà de ce délai ne pourra être autorisée que par la loi.
Le nouveau régime prévoit des mesures limitant la liberté d’aller et venir, la liberté de réunion et la liberté d’entreprendre. Il prévoit, en cas de violation des règles de confinement, une amende de 135 euros et de 1 500 euros en cas de récidive dans les 15 jours.
Le gouvernement est habilité à prendre par ordonnances une série de mesures économiques pour soutenir les entreprises (mesures de soutien à la trésorerie, aide directe ou indirecte et facilitation du chômage partiel) et limiter les cessations d’activité et les licenciements.
Enfin, le projet de loi prévoit que le second tour des municipales soit reporté au plus tard au mois de juin. La date sera fixée par décret en Conseil des ministres le 27 mai au plus tard et les déclarations de candidatures seront déposées au plus tard le mardi qui suit la publication de ce décret. Au plus tard le 23 mai, le gouvernement remettra au Parlement un rapport sur l’état de l’épidémie et les risques sanitaires. Si le second tour ne se tient pas en juin, la tenue de deux tours de scrutin devra avoir lieu. Pour les candidats élus dès le premier tour, le scrutin est néanmoins définitif avec le report des conseils municipaux élus au premier tour.
Lors des débats, le groupe socialiste s’est abstenu. Il a rappelé son attachement aux libertés et au droits du Parlement. Notre collègue Jean-Pierre Sueur a notamment expliqué l’importance de soutenir les mesures de ce texte dans ce moment d’union nationale. Retrouvez son intervention ici : http://videos.senat.fr/video.1569251_5e777111bc8ae.seance-publique-du-22-mars-2020-apres-midi?timecode=6272000
Si notre « notre solidarité est totale », le groupe socialiste s’est abstenu pour plusieurs raisons.
Premièrement, en raison de l’absence du respect des droits du Parlement qui avait demandé que cet état d’urgence soit maintenu, comme le recommandait le Conseil d’Etat, pour un mois. Cela n’a pas été retenu, le gouvernement souhaitant que ce délai soit étendu à deux mois.
Deuxièmement, en raison du non-respect du droit du travail : si l’Assemblée nationale a autorisé que les congés payés puissent être pris par les salariés durant cette crise sanitaire, cela ne sera possible que par des accords de branche. Cela n’est malheureusement pas le cas concernant la prise de RTT ou de jours de repos.
Troisièmement, l’article 13 voté par le Sénat prévoyait un droit d’information du Parlement sur l’ensemble des actes du gouvernement, qu’ils fussent pris à titre réglementaire ou en vertu de la loi. Or, cet article ne s’appliquera plus qu’à l’urgence sanitaire.
Enfin, l’article 4 permet au gouvernement de prendre toute autre mesure nécessaire, ce qui pose question sur sa signification et son application.
Le président du groupe, Patrick Kanner, a rappelé que ce projet de loi ne pouvait être pris à la légère, soulignant qu’« une crise, quelle qu’elle soit, ne peut servir à affaiblir nos libertés individuelles et notre démocratie ». Il a salué le travail de nos soignants et de tous nos agents publics dont la mission est indispensable dans la gestion de cette crise. Ils ne doivent plus être des variables d’ajustement budgétaire.
Retrouvez son intervention ici : http://videos.senat.fr/video.1569251_5e777111bc8ae.seance-publique-du-22-mars-2020-apres-midi?timecode=9325000
2- Le projet de loi de finances rectificative a été adopté par le Sénat le 20 mars 2020, sans modification en première lecture, après son adoption par l’Assemblée nationale (cliquez ici pour lire le texte).
Il prévoit un arsenal immédiat de 45 milliards d’euros pour aider les entreprises en difficulté et financer le chômage partiel.
Si le texte prévoit, dans son exposé des motifs, un abondement pour l’hôpital de 2 milliards d’euros pour l’achat de matériel et le bénéfice des soignants, cet abondement ne figure pas dans les articles du PLFR. Le gouvernement a confirmé son engagement concernant ces 2 milliards d’euros mais a rappelé qu’ils seront intégrés dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, sans date pour l’instant. Nous ne pouvons que regretter que cette aide financière, cruciale pour aider concrètement nos soignants, ne soit pas étudiée dans ce PLFR. Notre groupe a demandé que ces 2 milliards d’euros soient versés à nos hôpitaux sans délai.
Enfin, le groupe socialiste a déposé des amendements concernant les aides aux compagnies de spectacle d’art vivant et aux intermittents, et a demandé des mesures d’ouverture pour les librairies. Mais ces amendements ont été soit retirés soit rejetés.