Je suis intervenue sur la mission Action extérieure de l’Etat, sur les crédits relatifs à l’action du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, ceux relatifs à la diplomatie cultuelle et d’influence et enfin les crédits relatifs aux Français de l’étranger et aux affaires consulaires. Retrouvez mon intervention ci-dessous en vidéo :
Texte de mon intervention:
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président et rapporteur, mes chers collègues,
L’année dernière, je regrettais, à cette tribune, la réduction des moyens, dans la droite ligne de la saignée infligée à ce ministère depuis plus de 20 ans. Nous nous lamentions sur tous les bancs qu’en votant un budget continuellement en baisse nous choisissions, de fait, de dégrader la qualité du service public rendu dans nos consulats mais aussi d’affaiblir l’image de notre culture et de notre langue, portées par nos réseaux AEFE et MLF, nos Instituts et Alliances françaises et nos Instituts de recherche. Par solidarité gouvernementale, vous défendiez, très naturellement, les arbitrages rendus. En 2018, nous avons voté « contre » la suppression des 33 millions d’euros qui a déstabilisé l’AEFE et contre la suppression de plus de 240 postes en deux ans. Nous n’avons pas voté un budget qui n’était pas à la hauteur de nos ambitions et nous ne voulions pas donner raison à Bercy, qui demande chaque année de nouvelles économies.
Nous voulions montrer notre solidarité à l’égard des personnels à qui l’on demande de faire toujours plus avec des moyens réduits. Alors, avons-nous été entendus ou la crise sanitaire a-t-elle, tout simplement, suspendu les coupes ?
Notre ambition demeure la même : celle de préserver nos moyens, voire de les consolider, par les amendements que nous proposons.
Monsieur le Ministre, quand vous nous annoncez cette année une stabilisation du budget, l’abandon définitif des suppressions de postes en mettant fin au plan d’Action Publique 2022, confirmé lors de votre audition en commission et voire même l’augmentation de certaines lignes budgétaires – grâce notamment aux reports des crédits non utilisés du PLFR3 – nous ne pouvons que nous en réjouir et notre vote le prouvera. Nous espérons simplement que le virage budgétaire que vous venez d’amorcer s’inscrira dans le temps. Vous pourrez compter sur nous pour le soutenir et l’accompagner.
Nous saluons la hausse de 3,65% du programme 105. Ce budget recueille des crédits pour augmenter les contributions volontaires, les travaux de sécurité de nos postes, l’entretien de notre patrimoine, tous bienvenus. Seul regret : il reste peu de crédits pour les postes.
Mais je tiens à saluer l’effort budgétaire particulier qui s’inscrit dans la lignée des Gouvernements de François Hollande, où la sécurité passive de nos emprises est devenue prioritaire puisque 204 millions d’euros lui ont été affectés depuis 2015. Je tiens tout particulièrement à saluer le rôle des membres des comités de sécurité et de nos élus locaux qui se réunissent afin de répondre au mieux aux situations locales. Nous pensons cependant que des progrès peuvent être encore réalisés en matière de réactivité et de communication en cas d’attaques.
Les crédits du programme 151 sont stables. La légère hausse que nous notons est due au report de crédits non utilisés en 2020.
Le maintien de la dotation dédiée aux bourses scolaires à 102 millions d’euros ne permettait pas d’anticiper les difficultés économiques à venir que connaissent les familles en raison de la crise sanitaire. Il est heureux que 30 millions d’euros, votés dans le PLFR et non utilisés, viennent s’y ajouter.
Les impayés de ce trimestre commencent à déstabiliser les budgets déjà fragiles des établissements et nous laissent craindre le pire, pour le second et troisième trimestres en 2021, quant aux équilibres financiers des établissements scolaires de l’AEFE et de la MLF. Enfin, ne relâchons pas nos efforts pour soutenir notre réseau d’écoles francophones et nos établissements MLF au Liban.
Nous saluons l’aide ouverte pour la première fois aux familles étrangères, qui constituent les 2/3 des effectifs – avec le bémol de la sous-consommation des crédits et leur non-reconduction en 2021. Les critères ont paru suffisamment intrusifs pour que beaucoup renoncent à déposer un dossier. Enfin les instructions sont arrivées dans les postes parfois trop tard pour le dépôt des demandes.
Ces dysfonctionnements sont l’expression, dans de nombreux pays, de la faiblesse des équipes, en effectifs trop réduits. Le télétravail ne permet pas de couvrir toutes les missions. Nos compatriotes du collectif « Love is not tourism », séparés de leurs conjoints, en sont les premières victimes.
Pour ce qui est maintenant des aides sociales, en raison d’un cadrage trop serré des conditions d’éligibilité aux aides, force est de constater que les crédits débloqués pour ces aides exceptionnelles n’ont pas été utilisés à la hauteur des besoins. Seul 2,5 millions d’euros ont été versés – grâce à une révision des critères d’attribution – alors que nous savons que de nombreux compatriotes se trouvent dans des situations très précaires. Les femmes sont particulièrement touchées. Tout comme pour les critères d’obtention des bourses, il me semble urgent de revoir les documents et les informations que l’on requiert des demandeurs. Beaucoup ont fait appel à leurs économies mais risquent maintenant de se tourner de plus en plus vers le secours occasionnel. Pour y répondre, les Organisme locaux d’entraide sociale (ou OLES) existants ou créés ont joué un rôle essentiel.
Néanmoins, comme ils n’existent pas dans tous les pays, nous pensons que le basculement des crédits du STAFE vers les OLES doit demeurer exceptionnel, d’autant que l’allocation de cet argent public échappe totalement au contrôle des conseils consulaires.
Je souhaiterais maintenant aborder la question des élections consulaires, reprogrammées en mai 2021. Pour désigner les futurs 443 Conseillers des Français de l’étranger, près d’1,8 million de compatriotes seront appelés à voter en présentiel et par voie électronique. Néanmoins, il semblerait que pour des raisons de sous-effectifs mais également économiques, il ait été demandé aux postes de réduire le nombre de bureaux de vote.
Si le vote physique est compliqué par la situation sanitaire, comment s’assurer que ces élections se déroulent dans des conditions satisfaisantes si on demande, en plus, aux électeurs de faire des dizaines de kilomètres pour voter à l’urne ?
On ne peut pas non plus compter sur le seul vote électronique qui se heurte, à certains endroits, à la fracture numérique et une incertitude quant à l’organisation optimale même du vote par la société retenue. Dans le contexte actuel, il va de soi que le renforcement de l’efficience du dispositif de vote électronique soit garanti sur tous les continents.
Enfin le budget du programme 185 est stable, avec des évolutions contrastées. Nous déplorons d’abord que l’AEFE ne bénéficie pas de la décision du gel des suppressions de postes avec 71 nouveaux postes de moins cette année. Les conséquences ne sont pas neutres. La charge de la masse salariale bascule sur les établissements, déjà en grande difficulté, puisque les postes de résidents ou détachés sont transformés en poste de recrutés locaux.
La crise sanitaire frappe de plein fouet le réseau de ces 650 Alliances. Les deux millions d’euros déployés ont certainement évité des fermetures. Nous proposons une aide complémentaire parce que la situation demeure critique.
Rappelons, à ce titre, la pétition “Sauvons les Alliances Françaises” qui a recueilli plus de 10 000 signatures à l’été 2020, preuve de l’attachement des francophiles du monde à ce réseau.
Pour ce qui est des Instituts français, dont le budget est stable par rapport au PLF 2020, nous pensons qu’un Fonds d’urgence les aiderait à traverser la crise. Ils ont puisé dans leur fonds de roulement mais leur situation demeure extrêmement fragile.
Nous avons l’immense honneur de posséder le premier réseau culturel au monde. Protégeons-le, chérissons-le.
Pour conclure, je voudrais rendre hommage à la mobilisation de l’ensemble des personnels titulaires, contractuels et recrutés locaux de votre ministère, en poste à l’étranger comme en France, à commencer par vous, monsieur le ministre, sans oublier nos conseillers des Français de l’étranger et les associations qui n’ont pourtant pas été épargnés.
Cette mobilisation de nos réseaux et relais locaux a permis le retour de plus de 370 000 Français.
Elle assure la sécurité de nos ressortissants tout autant que celle de nos représentations. Elle fait vivre la citoyenneté de nos compatriotes grâce au service public de nos consulats et aux élections qu’elle organise. Elle partage nos valeurs et notre langue dans nos réseaux culturels et éducatifs. Elle aide au développement des pays où nous sommes présents. Une des leçons à tirer de la crise sanitaire qui nous touche est l’utilité d’un service public solide qui protège et apporte son soutien quand tout semble s’écrouler. On ne peut pas compter sur le seul engagement et le dévouement des personnels. Certes, ils ont démontré qu’ils ont su se mobiliser au pic de la crise et révéler ainsi la résilience de nos réseaux diplomatique, consulaire, culturel et éducatif.
Donnons-leur les moyens de continuer !