Je me suis rendue à Erevan, capitale de l’Arménie, à l’occasion des commémorations du génocide qui a eu lieu en 1915. Cela fait des années que je souhaitais être présente, par fidélité à ces déracinés avec qui j’ai grandi, arrivés nombreux à Lyon et sa région d’un pays qu’ils avaient fui et qui se trouve à une nouvelle étape critique de son histoire. Bien au-delà de la dispute territoriale avec l’Azerbaïdjan, les enjeux géopolitiques en Arménie sont uniques et complexes avec la présence de puissances étrangères antagonistes en soutien des deux pays. Dans ce jeu d’alliances, il est regrettable que la France fasse cavalier seul en Europe dans son soutien indéfectible à l’Arménie. Il est tout aussi regrettable que des partenaires européens fassent le choix de s’associer à l’Azerbaïdjan pour des raisons énergétiques et économiques alors que ce pays menace explicitement l’existence de l’Arménie.
Dans ce contexte, j’ai débuté cette mission par un entretien avec notre ambassadrice Anne Louyot, le consul Thibault Nonier et le conseiller de coopération et d’action culturelle Guillaume Narjollet. J’ai également échangé avec la rectrice de l’Université française en Arménie (UFAR) Salwa Nacousi. Ensemble, nous avons fait un point sur la relation bilatérale dans les domaines politique, économique, éducatif, universitaire et culturel. Nous avons également abordé l’actualité géopolitique régionale extrêmement tendue et préoccupante. J’ai enfin rencontré Laurence Terzan, conseillère de la ministre de la santé qui est en détachement auprès d’Expertise France.
J’ai ensuite échangé avec le commandant Patrick Aprile qui suit les questions de défense près l’Ambassade de France en Arménie, qui m’a exposé les différents enjeux militaires dans le pays et la région ainsi que la mise en place d’une mission de défense à partir de juillet prochain.
Avec le consul, nous avons poursuivi les auditions par un long et riche entretien téléphonique avec Lusine Bardon-Hambardzumyan, conseillère des Français de l’étranger pour la circonscription Arménie-Géorgie et qui réside à Tbilissi, afin d’évoquer les problématiques qui touchent nos compatriotes établis dans le pays.
J’ai retrouvé le consul de France Thibault Nonier pour discuter des affaires consulaires et de la situation des quelques 613 Français résidant en Arménie, pour la plupart dans la capitale. La pression augmente sur les demandes de visas avec des rendez- vous maintenant repoussés à deux mois par faute de personnel et une demande exponentielle pour un petit pays. Nous avons également parlé de la commission des bourses ainsi que du comité consulaire pour la protection et l’action sociale (CCPAS).
J’ai ensuite rejoint la délégation sénatoriale du groupe des Chrétiens d’Orient conduite par Bruno Retailleau pour rencontrer le ministre des affaires étrangères Ararat Mirzoyan, puis le Premier ministre Nikol Pashinyan. Récemment, l’Azerbaïdjan a décidé d’installer un check point et de fermer le pont qui permet le ravitaillement de Latchine, seul axe reliant l’Arménie à la région de Nagorny Karabakh où vivent encore 140 000 personnes. Les menaces permanentes du gouvernement azéri sont réelles et remettent en question l’existence même du modèle démocratique et de l’État de droit arméniens. Plus que jamais, notre soutien à l’Arménie doit être indéfectible face aux autocraties qui menacent son intégrité territoriale et démocratique. L’engagement de la France mérite d’être suivi par l’ensemble de l’Union européenne qui a déployé une mission civile d’observation.
Nous avons poursuivi ces échanges sur les enjeux politiques régionaux avec le président de l’Assemblée nationale arménienne Alen Simonyan qui devrait conduire une visite en France très prochainement.
Enfin, le 24 avril, nous nous sommes rendus au mémorial de Dzidzernagapert pour rendre hommage aux victimes du génocide arménien et déposer une gerbe au nom du Sénat. C’était un devoir de mémoire d’être présente mais aussi l’occasion de partager un moment fort et poignant en présence d’Arméniens dont, pour beaucoup, le souvenir de cet épisode funeste de l’Histoire, vécu dans de très nombreuses familles, reste encore vif et douloureux.