Notre interview sur l’attaque du Hamas contre Israël pour Public Sénat

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Les sénateurs de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat ont été interrogés par Public Sénat sur l’attaque du Hamas contre Israël. 

« Les premières victimes, comme souvent, sont des innocents. Ils ont frappé cette jeunesse israélienne qui aspire à trouver une solution et qui, peut-être, manifestait contre le gouvernement actuel et ses éléments extrémistes »

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Les combats se poursuivent ce lundi dans le sud d’Israël, 48 heures après l’attaque surprise du Hamas autour de l’enclave palestinienne de la bande de Gaza. Le groupe armé, classé par l’Europe sur la liste des organisations terroristes, a lancé son offensive à l’aube samedi, un demi-siècle jour pour jour après le début de la guerre du Kippour. L’attaque a surpris par son ampleur et sa violence, mettant en déroute la défense israélienne et faisant plus de 1 100 morts en quelques heures, selon différents bilans. « C’est une incroyable tragédie, qui ne fait que s’aggraver d’heure en heure », déplore auprès de Public Sénat Cédric Perrin, le président LR de la commission des Affaires étrangères. « Les services de renseignement israélien ont failli. Par ailleurs, le redéploiement ces derniers temps d’un certain nombre d’effectifs dans le nord du pays n’a pas aidé. »

Le Hamas revendique avoir tiré plus de 5 000 roquettes. Un bilan officiel fait état de plus de 700 victimes israéliennes, et plus de 400 morts côté palestinien, selon le Hamas. L’armée israélienne a riposté avec l’opération « Sabre de fer », lançant notamment une série de bombardements sur la bande de Gaza. En outre, un porte-parole israélien a indiqué que de nombreux otages civils se trouvaient désormais aux mains du Hamas.

« Un méga-Bataclan »

Au moins 250 personnes qui participaient samedi à une rave party dans le désert, près de la bande de Gaza, ont été tuées aux premières heures de l’attaque, ont rapporté des secours dépêchés sur place. « Les premières victimes, comme souvent, sont des innocents. Ils ont frappé cette jeunesse israélienne qui aspire à trouver une solution et qui, peut-être, manifestait contre le gouvernement actuel et ses éléments extrémistes », soupire la sénatrice socialiste Hélène Conway-Mouret, qui a été ministre déléguée chargée des Français de l’étranger sous François Hollande.

Olivier Cadic parle d’un « méga-Bataclan ». « Tout le monde est sidéré par l’ampleur inégalée de cette attaque, qui allie à la fois attaque militaire traditionnelle et attaque terroriste », poursuit le centriste, vice-président de la commission des affaires étrangères. « Les Israéliens sont confrontés à quelque chose qu’ils n’attendaient pas. Pour l’heure, ils sont encore dans la réaction. L’enjeu, dans les prochains jours, sera de récupérer l’initiative. C’est leur survie qui se joue. »

« Le gouvernement israélien montre des difficultés. On sait que le Premier ministre Benyamin Netanyahou ne s’entend pas avec son armée. Le pays vit dans un état de tension permanente depuis des années, il y a peut-être une forme de lassitude, et donc de relâchement, qui s’est installée », analyse Hélène Conway-Mouret. « Je souhaite que l’on évite un embrasement plus important. On sait le jeu de certaines puissances étrangères – l’Iran pour ne pas la nommer, – qui pourrait mettre le feu à l’ensemble de la région. Par ailleurs, les otages faits par le Hamas obligeront peut-être Israël à modérer sa réponse. »

Le risque de contagion

« L’objectif de l’Iran est de faire exploser le processus de normalisation qui s’est mis en place entre Israël et un certain nombre de pays arabes », explique Cédric Perrin. « En publiant les vidéos des exactions commises, le Hamas cherche à radicaliser les opinions publiques, de part et d’autre », pointe-t-il. Cette situation pose la question du rôle de la communauté internationale, qui a semblé, ces dernières années, délaisser la question israélo-palestinienne. « Les Iraniens et les Russes jouent aux échecs dans la région, et les Occidentaux se contentent de regarder la partie », regrette encore le président de la commission des affaires étrangères.

« Notre responsabilité est immense pour limiter le risque de réplique », souligne Guillaume Gontard, le président du groupe écologiste, et coauteur d’un rapport sur le processus de paix dans la région. « La France toute seule n’a pas de poids au niveau international pour mener une initiative diplomatique efficace, mais nous pouvons nous appuyer sur le bloc démocratique des 27 pour lancer un mouvement », soutient Hélène Conway-Mouret. Les ministres des Affaires étrangères de l’UE ont été convoqués par Josep Borrell, le vice-président de la Commission européenne pour une « réunion d’urgence » mardi.

« Le Quai d’Orsay et l’Union européenne ont très bien réagi en qualifiant cette attaque de ‘terroriste’ », salue Olivier Cadic. « Tout le monde comprend désormais que le Hamas n’est pas pour composer une solution à deux Etats, mais œuvre pour la destruction d’Israël. Si, au sein de la communauté internationale, certains se refusent à le considérer comme un groupe terroriste, on va créer un autre problème. »

Les ambiguïtés de LFI secouent la Nupes

En France, la réaction de plusieurs membres de LFI sur les réseaux sociaux a soulevé une vive polémique, certains semblant renvoyer dos à dos Israël et l’autorité palestinienne, notamment en rappelant la politique de colonisation menée en Cisjordanie, un territoire palestinien occupé. « L’offensive armée de forces palestiniennes menée par le Hamas intervient dans un contexte d’intensification de la politique d’occupation israélienne à Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem Est », rappelle notamment la première phrase du communiqué des députés LFI.

« Bien sûr qu’il y a des raisons à ce qu’il se passe aujourd’hui en Israël, mais lorsque des familles sont endeuillées, ce n’est certainement pas le moment d’avoir ce genre d’attitude. Ce serait excuser des actes terroristes. Ces discussions interviendront, mais dans un second temps », balaye Hélène Conway-Mouret. « Nous sommes dans le temps de la compassion, et il faut savoir le respecter. La position des écologistes est claire : le Hamas doit être considéré comme un groupe terroriste », martèle Guillaume Gontard, qui rappelle toutefois que la « Nupes n’est pas un parti, mais un accord politique, ce qui permet des expressions différentes d’un parti à l’autre ».

La commission des affaires étrangères du Sénat auditionnera mercredi 18 octobre la ministre Catherine Colonna dans le cadre de la préparation des discussions sur le budget 2023. La cheffe de la diplomatie française devrait à cette occasion être longuement interrogée sur la situation israélienne. Cédric Perrin évoque aussi une rencontre avec l’ambassadeur israélien, il réfléchit également à lancer un travail sur le financement du Hamas. « C’est une vraie question dans la mesure où l’UE accorde un certain nombre d’aides à l’autorité palestinienne. »


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